Réalisation vidéo 360° et entretien par Sebastien Loghman avec Frédéric Cussey du studio de réalité virtuelle BACKLIGHT

Article initialement publié dans VR Story

Une des sensations du salon Virtuality 2017 au Centquatre – Paris Ă©tait sans conteste l’expĂ©rience pour Diesel, Only the Brave High de Backlight. Sebastien Loghman a rencontrĂ© FrĂ©dĂ©ric Cussey, VR director et pre-sale manager pour qu’il nous raconte la conception de ce parcours au dessus du vide. L’occasion aussi de redĂ©couvrir le cartoon VR Birdy King Land, premier grand succĂšs de Backlight.

Sebastien L. : FrĂ©dĂ©ric, tu es ici pour prĂ©senter le film VR Birdy King Land et l’expĂ©rience pour Diesel, Only the Brave High. Peux-tu nous raconter l’histoire de Birdy King Land ?

FrĂ©dĂ©ric Cussey : Birdy King Land est sorti fin 2014, il a eu la chance de tourner en festivals trĂšs vite. Quand on l’a sorti, il n’y avait pas tellement de projets avec une narration, une direction artistique poussĂ©e, une immersion en tant que personnage d’animation, une vraie prĂ©sence
 On l’a crĂ©Ă© parce qu’on Ă©tait un peu trop frustrĂ©s par les contenus qui Ă©taient alors prĂ©sents.

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Sebastien L. : Ce qui m’a tout de suite marquĂ©, c’est qu’on entre dans un univers de BD. On voit des phylactĂšres flotter au-dessus des personnages pour nous informer de la mission sur l’ile.

FrĂ©dĂ©ric Cussey : C’est exactement ça, on lance l’expĂ©rience par des planches de BD Ă  360°. Le propos est d’immerger tranquillement le spectateur avec des repĂšres qu’il connaisse, du dessin. Évidemment Ă  la fin de l’introduction, on lui signifie ce qu’est la VR avec des flĂšches l’incitant Ă  regarder un point d’entrĂ©e vers la suite de l’expĂ©rience. LĂ , on passe dans un univers modĂ©lisĂ© en 3D avec du parallaxe notamment. Le passage de la 2D Ă  la 3D appuie l’immersion.

Sebastien L. :Aussi, ce qui aide Ă  l’immersion est qu’il y a une quĂȘte, une petite histoire pour le visiteur qui incarne un des personnages.

FrĂ©dĂ©ric Hussey : Nous arrivons sur cette ile pour trouver l’oiseau endĂ©mique et mythique de Birdy King Land, mais alors qu’on vient juste de se mettre en route, l’oiseau chipe le burger de notre camarade !

Sebastien L. : C’est une anecdote qui m’est rĂ©ellement arrivĂ© quand j’étais enfant d’ailleurs. Une mouette m’a volĂ© mon hot dog sur la plage. J’ai Ă©tĂ© traumatisĂ©.

FrĂ©dĂ©ric Cussey : Et bien c’est ce qu’on fait, on traumatise les enfants Ă  notre tour ! On dit que Walt Disney Ă©tait musophobe et qu’il avait crĂ©Ă© Mickey pour que les enfants n’en aient plus peur.

Sebastien L. : C’est vrai qu’on a, avec la VR, une dimension cathartique. Elle aide aussi rĂ©ellement Ă  lutter contre les phobies. Par exemple j’ai facilement le vertige et votre expĂ©rience pour Diesel, Only the Brave High, m’a impressionnĂ© mais beaucoup plu. Peux-tu nous en parler ?

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FrĂ©dĂ©ric Cussey : Avec plaisir. Only the Brave High – le parfum de Diesel Ă  la bouteille en forme de poing – est, comme son nom l’indique, une expĂ©rience destinĂ©e aux braves. On commence debout sur la corniche d’un immeuble dos Ă  une fenĂȘtre ouverte, au dessus du vide. On doit aller de l’autre cĂŽtĂ© de l’immeuble oĂč une gargouille en forme de loup porte dans sa gueule la bouteille de parfum.

Sebastien L. : On va littĂ©ralement chercher le Graal dans la gueule du loup ! C’est vraiment que pour les braves.

D’ailleurs, pour complĂ©ter la description, prĂ©cisons qu’un dĂ©cor est rĂ©ellement construit et que la bouteille de parfum est bien rĂ©elle Ă  la fin, ce qui rend les sensations encore plus troublantes. La corniche est construite avec une petite surĂ©lĂ©vation, juste suffisante pour qu’on y croit. On porte des capteurs sur les jambes ce qui permet de voir dans le casque nos pieds.

FrĂ©dĂ©ric Cussey : Oui, on a montĂ© les manettes du HTC Vive sur des sortes de protĂšges tibia pour remettre de l’humain dans l’expĂ©rience.  Sans les pieds, on aurait perdu la dimension physique. Il y a un bloc climatiseur qui est vraiment construit, ce qui contraint le corps Ă  passer en dessous et se pencher au-dessus du vide.

Sebastien L. : La ‘suspension consentie de l’incrĂ©dulité’ fonctionne Ă  merveille. J’ai beau avoir vu le dĂ©cor en entier avant l’expĂ©rience, j’ai continuĂ© Ă  avoir des surprises pendant l’immersion, j’ai franchit des obstacles
 Et j’ai franchement flippĂ©.

FrĂ©dĂ©ric Cussey : Dans ce contexte mixte entre physique et rĂ©alitĂ© virtuelle, mĂȘme avec une D.A. ‘cartoon’, tu aurais eu peur du vide !

Sebastien L. : La direction artistique offre aussi un beau travail sur la lumiÚre.

FrĂ©dĂ©ric Cussey : On essaie de donner du sens dans nos expĂ©riences et une bonne direction artistique. Le photo rĂ©alisme n’est pas encore tout Ă  fait possible, mais le ‘trĂšs rĂ©aliste’, oui. On en fait pour de la simulation architecturale. Mais bon, d’un point de vue artistique ce n’est pas ce qu’il y a de plus intĂ©ressant, de reproduire le rĂ©el tel quel.La ville qu’on a crĂ©Ă©e pour Only the Brave High, est un mix entre New York et Gotham City avec des teintes assez chaudes.

Sebastien L. : En dehors de l’aspect comique – vu de l’extĂ©rieur, on a tous l’air complĂštement timbrĂ©s quand on vit une expĂ©rience VR – je trouve ce que ça rĂ©vĂšle sur nous mĂȘme trĂšs intĂ©ressant. J’adore observer celui qui vit une expĂ©rience VR. Il est dĂ©complexĂ©, oublie le regard des autres. Dans notre rĂ©alitĂ©, hors du contexte qu’il vit dans son casque, il est nu.

FrĂ©dĂ©ric Cussey : On rĂ©cupĂšre quelque chose de trĂšs primitif. On sait qu’on ne peut pas marcher dans le vide. Quand on ramĂšne quelqu’un dans un environnement Ă  360° avec pour seul Ă©quivalent la vie rĂ©elle, ce vide devient une rĂ©alitĂ©. Il appelle des sens qui sont ancrĂ©s en l’homme depuis des gĂ©nĂ©rations, on ne sait pas voler. Icarre a essayĂ©, on sait ce qu’il lui est arrivĂ© !

Cet appel Ă  ce qu’on est fondamentalement, on le retrouve chez les utilisateurs qui, grĂące au son, sont dĂ©connectĂ©s de la rĂ©alitĂ© et immergĂ©s dans la VR. Ils sont ce qu’ils sont, sans complexe social. C’est beau Ă  voir.

Sebastien L. : Ce sont un peu des cobayes consentants ?

FrĂ©dĂ©ric Cussey : C’est mĂȘme pas que ça. Quand on crĂ©e du contenu, de la peinture, du dessin, des films, on a envie de procurer de l’émotion aux gens qui veulent la recevoir. Et typiquement, ce flot de ressenti, d’émotions vĂ©cues avec nos expĂ©riences, c’est gratifiant humainement parce que les gens sont naturels dans ces moments-lĂ . Retrouver ça n’a pas de prix.

Sebastien L. : Et bien bravo !

FrĂ©dĂ©ric Cussey : Merci ! Je passerai le message Ă  toute l’équipe. Il y a pas mal de gens qui travaillent sur nos expĂ©riences. On n’appelle pas ça des graphistes ou des ‘exe’ chez nous, on parle plus volontiers d’artistes. Chacun est force de proposition, tant dans le travail de modĂ©lisation, que de texture ou de lumiĂšre. Les gens qui travaillent Ă  l’écriture dont je fais partie, partent d’une feuille blanche et se demandent non pas ‘qu’est ce qu’on peut faire ?’ mais qu’est ce qu’on aimerait vivre sur un sujet en particulier ou pour une marque. Ce qu’on aimerait vivre, on essaie de le mettre en application et la technique vient dans un second temps.

Une petite pensĂ©e pour notre C.T.O. qui s’arrache les cheveux de temps en temps ! Mais pour le coup, on est content de voir que les gens s’éclatent autant avec nos expĂ©riences.

Sebastien L. : C’est agrĂ©able de voir cette libertĂ© dans le cadre d’une commande de grande marque.

FrĂ©dĂ©ric Cussey : On n’est pas lĂ  juste pour prendre des chĂšques. Les clients nous font relativement confiance, mĂȘme certaines grandes marques comme Diesel via l’agence 84 Paris. C’est une chance de pouvoir s’exprimer. Nous, on veut crĂ©er du contenu de qualitĂ©. On propose nos rĂ©alisateurs ‘maisons’ parce qu’ils sont au fait des problĂ©matiques de narration Ă  360° depuis ‘Birdy King Land’.

C’est dĂ©jĂ  pas Ă©vident d’amener le sujet lĂ  oĂč on veut l’amener en guidant l’attention dans une fenĂȘtre en 16/9. Guider dans du 360° ça l’est encore moins. On veut que les contenus qu’on crĂ©e ait un sens, que ce ne soit pas intĂ©ressant uniquement sur le plan technique. La technique, ça se maitrise, mais la dimension artistique ça se partage. On espĂšre pouvoir continuer. Vivement la suite !

Sebastien L. : Merci Frédéric !

Frédéric Cussey : Merci et à bientÎt !

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